Chiang Mai
Nous quittons Bangkok pour Chang Mai. Cette étape est différente. Joël, un ami de longue date de mon père, est avec nous. Il voyage en Asie depuis plus de quinze ans. Il y vit également plusieurs mois dans l’année. Il a tout organisé pour nous. Nous sommes donc accueillis et hébergés chez l’une de ses amies, Mao.
Une autre de ses amies, Jeab, est sollicitée pour nous guider. Nous avons ainsi l’occasion de visiter, avec des locales, la ville et ses alentours, de préparer à diner tous ensemble et de mieux connaitre ces deux femmes et leurs cultures.
Pour nous remettre du bruit et de la ville bouillonnante de Bangkok, Jeab commence par nous amener au Royal Flora Park. C’est un formidable jardin botanique. Nous sommes en fin de journée, il y a peu de monde. Nous pouvons découvrir les différents jardins tranquillement. Nous déambulons. Nous respirons le parfum des orchidées. Nous découvrons des petites statuettes aux frimousses espiègles. Nous avons une vue imprenable sur le parc du haut du temple qui le surplombe. Nous y restons jusqu’au coucher du soleil pour le regarder scintiller de mille feux sur la surface du lac. Le jaune, le orange, le rouge et les reflets du temple se mêlant à ceux de la végétation créent un tableau digne de Turner. En repartant, nous croisons une famille chinoise. Je les prends en photo. Cela nous donne l’occasion d’échanger. Ils habitent la région de Wuhan. A cette annonce, je me dis que ma mère va faire une syncope. Mais non ! Ils ont quitté Wuhan bien avant le début l’épidémie de coronavirus. Ils m’expliquent qu’ils sont maintenant en voyage forcé. Ils ne peuvent rentrer chez eux sous peine de quarantaine de longue durée. Alors ils profitent de Chiang Mai et de sa région. Nous partageons quelques adresses et étapes de voyages. Nous nous quittons en espérant que la crise sanitaire ne s’éternisera pas.
Le lendemain et les jours qui suivent, nous partons à la recherche de Bouddha. Au sens propre comme au sens figuré, Bouddha est partout. Il y a plus de trois cents temples dans la région. Nous commençons par le Wat Phra That Doi Suthep. Ce temple du XIVème siècle fait partie des plus anciens monuments sacrés de Chiang Mai. Lorsque nous arrivons en haut du temple Jeab va se recueillir et prier auprès de l’un des Bouddha. Une fois le rituel terminé, je la questionne naïvement. Pourquoi a-t-elle choisi ce Bouddha là et pas un autre ? Il y en a une vingtaine autour du chedi principal. Quelles sont les types d’offrandes ? Y a-t-il une prière « classique » comme le « pater noster » pour les Catholiques ? Elle me répond avec beaucoup de bienveillance et m’invite à ressentir la présence de Bouddha. Elle m’initie afin que je prie pour le bonheur et le salut de ma famille et de mes amis. Je m’agenouille. Je respire calmement. Je ferme les yeux. Je me concentre sur toutes les sensations positives et je me recueille. Juste à ce moment-là, les ampoules qui éclairent le bouddha auprès duquel je « médite » grésillent. Pendant un bref instant tout s’éteint puis se rallume. Cela donne une sensation mystique à mon expérience. Puis, dans le silence, Jeab me guide pour faire une offrande pour me protéger au cours de mon voyage. Je ne suis pas croyante. Cependant la ferveur de Jeab, sa prévenance, son enseignement me font percevoir quelque chose de nouveau. Lorsque nous redescendons, une complicité s’instaure entre Jeab et moi. Nous parlons, plus intimement, de nos vies, de nos choix, de nos espoirs.
Sur la route qui redescend vers Chiang Mai, nous nous arrêtons dans un autre temple au cœur de la forêt. Beaucoup moins tape à l’œil, Wat Pha Lat est un appel à la retraite loin de l’agitation touristique de masse. Ici, des personnes méditent pendant que quelques autres font des selfies. Le contraste est saisissant. Un miroir opposé d’image de soi, d’énergie et de communication.
Cette divergence me fait sourire. Cela parle tellement de notre société moderne. On ne prend plus le temps de respirer. On souhaite à tout prix prouver au monde que l’on profite. Nous restons là un certain temps à admirer le cadre reposant au cœur de la verdure. Peut-être que Bouddha est en moi, finalement.
Nous poursuivons notre quête de Bouddha dans la ville de Chiang Mai en visitant Wat Phra Sing et Wat Chedi Luang. En arrivant en fin de journée, nous assistons à la prière des moines. Comme à chaque fois, les chants et les prières donne au lieu une atmosphère particulière.
En nous baladant dans la ville, nous sommes surpris par l’alliance de kitch et d’ancien. Le cœur de ville est protégé par un ancien mur d’enceinte de forme carrée. Nous le longeons le long de canaux aménagés. De ci, de là, nous admirons des compositions florales aux couleurs criardes annonçant le festival des fleurs le week-end suivant. Nous marchons au hasard pour découvrir une ville vivante et cosmopolite.
Puis nous nous rendons au marché. On y trouve de tout : vêtements, bijoux, cosmétiques, fleurs, fruits, légumes, poissons et viandes, plats préparés et Street-Food…Le marché forme à lui seul un quartier. L’ambiance est électrisante. Locaux comme touristes regardent, comparent, négocient et achètent ce dont ils ont besoin. Jeab nous confirme que la population locale ne cuisine pas ou peu. Tous déjeunent, dînent à l’extérieur. Cela fait partie de l’organisation et de l’économie locale. Certains cuisinent pour d’autres qui conduisent des tuk tuk ou vendent des produits, etc. Nous nous perdons dans les allées, enivrés par une odeur, surpris par un objet ou attirés par le sourire ou le regard d’une commerçante. Jeab nous conseille et nous aide à négocier lorsque mes parents souhaitent trouver des souvenirs. Nous passons quelques heures sans voir le temps passer. Nous quittons cet endroit enchanteur où tout étal pourrait faire l’objet d’une histoire.
De retour chez Mao, ma mère se met en cuisine avec Jeab. Elle souhaite partager avec elle les secrets de la cuisson des légumes et du riz gluant, « sticky rice ». Les principes sont simples. Il suffit de ne pas faire trop cuire, de remuer tout le temps et de ne pas faire plusieurs choses à la fois.
Le soir venu, nous partageons ce diner pantagruélique fait des mets préparés et des achats du marché. Nous discutons avec Joël, Mao, Jeab de l’envie de Joël de s’installer ici, du prochain voyage de Mao en Angleterre, des talents de guide de Jeab, des voyages. La discussion se prolonge tard. Nous partons le lendemain. En nous quittant Jeab et Mao sont invitées à Paris. Je suis presser pour revenir pour le Water festival mi-avril. Jeab souhaite que je sois dans son équipe. Pour l’instant, nos prochaines aventures se dérouleront au Cambodge.
Un commentaire
Jean-Luc SANJOSE
Merci pour cet article très inspirant et qui donne l’envie de visiter Chang Mai et ses palais à ton rythme et avec les conseils avisés des locaux. Bonne suite dans ton périple en Asie !