Ride to the North – Part 2
Après quelques jours au cœur des rizières dans les environs de Sa Pa, il est temps de reprendre la route. Pour la seconde partie de ma boucle dans le Nord, je prévois de suivre la frontière chinoise avant de terminer par une croisière dans la baie d’Ha Long et la ville de Hanoi. Retour sur une boucle prévue de près de 1300 km.
Je quitte Sa Pa le 18 juillet. Je suis très mitigée. La région est splendide et j’ai profondément envie de la découvrir lors de la saison sèche afin de notamment pouvoir effectuer des treks sans être dans la gadoue et sous la pluie. Cependant, la relation extrêmement intéressée des personnes rencontrées dans cette usine touristique me refroidit un peu. Aussi, je pense que je reviendrai mais en prévoyant mieux ce périple afin de pouvoir l’explorer en sortant des sentiers battus.
J’enfourche mon bolide, direction Lao Cai et la frontière chinoise. Je constate amusée qu’en m’éloignant de quelques kilomètres de Sa Pa, je retrouve la relation chaleureuse que j’avais eu avec la population locale. Les sourires francs refont leur apparition, les « hello » curieux aussi. Arrivée à Lao Cai, je vais jusqu’à la frontière chinoise. Fermée, évidemment. Les frontières terrestres du Vietnam restent closes pour une durée indéterminée à ce jour. Il est impressionnant d’apercevoir la Chine, ce pays gigantesque, à cent mètres de distance. D’autres touristes vietnamiens font comme moi, une photo de la barrière, puis reprennent la route.
Je longe la frontière chinoise. De nombreux panneaux m’indiquent que je suis dans une zone frontalière. J’avais déjà du mal avec le vietnamien mais ici en fonction des villages que je traverse, la langue me semble un mélange de vietnamien et de chinois. Google translate est perdu… tout comme moi. Cela dit, de ma première partie de voyage dans le nord, j’ai appris les fondamentaux pour trouver une chambre d’hôtel et un repas chaud n’importe où. Je mets en pratique mes rudiments de langage avec de grands sourires. Nombre de fois, je ne sais pas bien où j’atterris et ce que je mange. Cela fait partie du voyage.
A Muong Khuong, ma première étape, l’hôtel que je trouve ressemble plus à un hôtel de passe désert qu’à autre chose. Dans ma salle de bain, des photos de jeunes asiatiques dans des postures aguichantes. C’est très étrange mais on m’avait prévenue que cela pouvait arriver. L’hôtel est propre et la literie correcte. Je ne me formalise pas mais je ferme ma chambre à double tour…
Le soir même, je cherche un endroit pour manger un morceau. Je suis attirée par une pancarte de poulet au barbecue, le tout écrit en anglais. En fait, seule la pancarte parle anglais. Le gérant pas du tout. Cela dit, il me vante le poulet et les nems. C’est donc ce que je commande. En guise de poulet, je découvre et je teste les pattes de poulet. Honnêtement, seule la friture était mangeable. Quant aux nems, ce sont en fait des «nems chua». C’est une préparation composée d’un mélange de viande de porc maigre fermentée et de fines lanières de couenne cuite, agrémentés d’ail et de piment. Son goût est plutôt aigre. Sa texture est ferme et élastique. Autant dire que ce ne fut pas mon meilleur repas, ni le meilleur de la cuisine vietnamienne… mais cela m’a donnée l’idée d’un futur article à paraître d’ici quelques semaines : « j’ai testé pour vous… ».
Le lendemain, je fais un tour au marché. Comme tous les marchés, il y a foule dès 6h du matin. J’observe l’installation des marchands, un homme qui transporte un porc entier à l’arrière de son scooter, des volailles en tout genre en cage, les femmes qui préparent leurs étals de fruits et de légumes. On peut distinguer les différentes minorités ethniques par leurs habits traditionnels. Personne ne me remarque réellement. Ils s’affairent tous dans leurs activités. Je profite alors de la possibilité d’être juste un « œil » pour regarder la vie locale et agricole à la frontière de la Chine.
Puis je reprends ma moto et je poursuis ma route par des équivalents de départementales. Elles sont globalement asphaltées et tortueuses à l’abord des montagnes. Les paysages, sont une nouvelle fois sensationnels : pains de sucre, montagne de thé, rizières en plateaux, épis de maïs dorés sur des pentes vertigineuses. Le tracé de la route et les cascades forment des cicatrices dans un paysage harmonieusement dessiné. Puis, les nuages, la brume et la pluie s’invitent.
Il est temps de s’arrêter. Je trouve refuge dans une auberge dont les propriétaires sont aussi des fermiers. Ils cultivent la cannelle et le riz. L’odeur de cannelle après la pluie embaume tout. C’est succulent et divin cette odeur légèrement sucrée et épicée qui plane dans l’air. Je partage le diner avec eux et le lendemain, ils me proposent de visiter leur domaine. Lin me donne un cours sur la culture du riz et me propose de tester la plantation de riz. Les pieds dans l’eau, recroquevillée, c’est la période du repiquage. Je découvre ainsi que différentes parcelles sont nécessaires pour favoriser une belle culture du riz. Voici les différentes étapes avant que le riz n’arrive dans votre assiette :
- Le riz est d’abord semé dans une pépinière. Il y restera entre 20 jours et 2 mois.
- Pendant ce temps, l’état des rizières est vérifié afin de s’assurer qu’elles pourront accueillir le riz. Cette étape consiste à labourer, vérifier l’état des canaux d’irrigation (les nettoyer ou en creuser d’autres), et enfin submerger les champs.
- Le riz passe alors de la pépinière à la rizière, c’est ce qu’on appelle le repiquage. Tout en s’assurant que la rizière soit bien irriguée, il faut ensuite attendre jusqu’à ce que le riz arrive à maturité. A ce moment-là, il faut arrêter l’irrigation et attendre que le riz commence à jaunir.
- Ensuite celui-ci est moissonné puis « égrainé ». Les grains de riz, encore dans leur enveloppe, sont ensuite étalés au soleil, parfois sur des bâches dans les jardins, ou bien à même le sol dans les rues, les cours d’écoles…
- Lorsqu’il est sec, le riz est sorti de son enveloppe et mis dans des sacs. Il est prêt ensuite à être cuit et dégusté.
Ma formation en riziculture terminée, je repars. Comme il a plu, les routes sont moins praticables. De moto routière, mon fidèle destrier se transforme en moto cross. Baloo, bien accroché, virevolte dans tous les sens à chaque tronçon de caillasse ou passage boueux. Je glisse. Je redresse. J’adapte ma vitesse à la situation. Je roule à 20km/h. Mes pieds forment parfois des béquilles supplémentaires pour continuer à avancer. Mes pieds bénéficient de bain de boue comme jamais.
D’ailleurs, le fleuve aussi a quitté sa belle couleur verte pour une eau trouble marronnasse.
La brume ou le soleil qui percent parfois les nuages donnent encore une atmosphère et un visage nouveau à la route. Je ne me lasse jamais de ce décor grandiose. Après deux jours à rouler entre boue, gravats, sable et goudron, je retrouve enfin la route asphaltée à une cinquantaine de kilomètres de Ha Giang.
Imaginant avec délectation un bel hôtel pour quelques nuits à Ha Giang, je suis stoppée à cinq kilomètres avant l’arrivée. Il y a eu des affaissements de terrain. La route est impraticable. Incrédule, je m’arrête. J’essaie de savoir ce qu’il se passe et si je pourrais rejoindre Ha Giang le soir même ou le lendemain. Nombre de vietnamiens attendent aussi. Ils ont l’air confiant. Alors je fais comme eux. Mais quand je constate l’ampleur des dégâts, je décide de rebrousser chemin et m’arrêter dans le premier hôtel.
Malheureusement, cette nuit-là, les orages sont nombreux. La pluie est torrentielle. Le lendemain, le constat tombe. Des inondations terribles ont ravagé Ha Giang. Des bâtisses ont glissé. Les terrains sont instables. L’armée a été appelée en renfort. Des morts sont à déplorer. Les locaux me déconseillent de poursuivre. Ils m’indiquent que toute la région est à risque et que cela prendra probablement plusieurs jours voire semaines pour pouvoir se balader en toute sécurité.
Dans le hall de l’hôtel, je croise une famille de français. Un bus part pour Hanoi dans deux heures. Ils rentrent. Trop dangereux. A regret, j’abandonne mes plans. Je reviendrais. Je mets ma moto dans le bus et moi aussi, direction Hanoi.
Une fois arrivée, je me bats dans la circulation. Ici la seule règle en matière de code de la route, c’est qu’il n’y en a pas. Mon incroyable destrier ne flanche pas. Il réagit au quart de tour à chaque fois qu’un scooter ou une voiture fait une embardée. Et puis, enfin, après une suée d’une demi-heure qui m’a semblé durer des heures, j’arrive à l’appartement que j’ai réservé pour quelques jours.
Nous sommes le 23 juillet. Je me laisse quelques jours de repos avant de découvrir la capitale vietnamienne et de définir mes futurs plans.
Mais voilà, le samedi 25 juillet, après 100 jours sans aucun cas de Coronavirus et aucun mort constaté au Vietnam, il y a une recrudescence du virus dont l’épicentre est à Da Nang. C’est de nouveau l’inquiétude, l’incertitude, l’ombre du Covid balaie tout. Tout le monde craint une nouvelle vague de confinement. Les jours suivants, le nombre de cas ne cesse de croître. Les deux premiers morts sont constatés. Je passe par toutes les couleurs de l’arc en ciel, envisageant toutes les options. Les locaux me disent d’être confiante qu’il n’y aura pas de seconde vague de confinement généralisé car le pays ne s’en relèverait pas.
Cela dit, même si la gestion de la crise est efficace et exemplaire au Vietnam, le 28 juillet, je décide de rentrer à Tam Ky. Quitte à être confinée, je préfère l’être en famille au bord de la mer.
Alors, après plus de 6000 kilomètres avec ma fidèle monture, je la rends à regret car il faut que je rentre vite pour ne pas être bloquée.
Dix-sept heures de train masquée plus tard, je retrouve Nguyên et sa famille. Ici, rien n’a changé. Je suis à la maison.
La suite ? Qui sait la dire ou la prédire aujourd’hui ?
Un commentaire
Marty
Bonjour Sarah. A Lyon il est 19h34. Je viens de lire tes parcours et tes péripéties. A Lyon le covid s invite toujours parmi nous. Et désormais le port du masque est devenu obligatoire dans tout Lyon et même au bureau. Je t avoue que c est compliqué d être masquée toute la journée. Ca tient chaud ce n est pas dans notre ADN et la communication visuelle prend une toute autre forme. Merci de tes partages. C est tout de même une sacrée aventure de vie que tu fais et je suis assez admirative. A très bientôt dans il en faut peu. Régine